« Pour le transport de marchandises sur de longues distances, l’hydrogène est la seule solution »

30/05/2022

Philippe Degraef, Febetra

Philippe Degraef, Febetra


De par sa position centrale dans le secteur des transports, Febetra – la Fédération Royale Belge des transporteurs et des prestataires de services logistiques – a une vision précise des opportunités et des défis liés au développement du transport routier zéro émission de marchandises.

Grâce à son travail de sensibilisation à tous les niveaux politiques – de l’échelle locale à européenne –, Febetra contribue à la création d’un cadre juridique durable pour le développement du secteur du transport. L’association veille également à défendre les intérêts de ses membres individuels.

« Notre tâche consiste en effet à défendre au mieux de nos capacités les intérêts des acteurs du secteur », explique le directeur général de Febetra, Philippe Degraef. « Bien entendu, nous y intégrons une attention particulière aux points sensibles, comme le besoin d’endiguer les émissions du transport routier et la problématique de la congestion des routes. »

Complémentarité avec les voies navigables et les voies ferrées

En ce qui concerne la congestion, Febetra ne considère pas le transport ferroviaire et la navigation intérieure comme des concurrents. « Il est clair que la capacité maximale de notre réseau routier est atteinte, et il n’y a aucune possibilité d’aménager de nouveaux grands axes. Nous devons donc utiliser de manière aussi efficace que possible le réseau routier existant. Nous y parvenons entre autres en étant complémentaires avec d’autres possibilités de transport, comme le transport ferroviaire et la navigation maritime. »

« À cet égard, certains de nos membres ont par exemple déjà investi dans des vélos cargo électriques. Ces derniers sont en effet pratiques pour la desserte du « dernier kilomètre » dans les environnements urbains, et ce pour plusieurs raisons. D’abord au regard de la croissance continue du commerce électronique – de facto du nombre de petits colis à livrer – mais aussi de par le fait que les vélos cargo peuvent assurer des livraisons 24h/24 dans les villes. Il s’agit d’une évolution logique. »

La problématique du diesel

« À ce jour, en Belgique, 98 % du transport routier de marchandises s’effectue via des camions fonctionnant au diesel. Ce carburant représentant 25 % des coûts totaux d'un transporteur, vous pouvez imaginer qu'il pèse lourdement sur les marges bénéficiaires. »

En outre, les autorités belges envisagent de supprimer le système du diesel professionnel. Ce système implique que les transporteurs professionnels peuvent récupérer par la suite une partie des accises qu’ils paient à la pompe. « Notre point de vue à ce sujet est clair. Bien que nous soutenions avec conviction les initiatives facilitant le transport sans émission, celles-ci nécessitent qu’une technologie alternative soit disponible, largement déployable et viable financièrement. Sans quoi la suppression du système du diesel professionnel ne fera que désavantager nos transporteurs pour de mauvaises raisons. »

Transport de marchandises neutre en carbone

« Quoi qu’il en soit, nous devons nous atteler plus rapidement au déploiement d’alternatives durables à grande échelle pour notre flotte au diesel. Le transport électrique de marchandises – des vélos cargo aux camionnettes électriques et en passant peut-être aussi par des camions compacts – peut jouer un rôle important pour les activités de desserte du « dernier kilomètre », mais pour le transport de fret lourd traditionnel sur de plus longues distances, l’hydrogène est la seule solution en laquelle nous croyons réellement. »

« Le fait est que l’autonomie des camions électriques reste limitée et que le poids occupé par les batteries signifie une capacité de chargement réduite. Ce n’est évidemment pas optimal pour le transport de marchandises. Les temps de charge sont également relativement longs et nous ne sommes pas en mesure à l’heure actuelle de déterminer si le réseau électrique sera capable de supporter partout des puissances de charge aussi élevées. L’hydrogène ne pose pas tous ces problèmes. »

« Il est clair que cette transition nécessitera des efforts financiers considérables. Selon nous, ces efforts devraient être répartis, d’une manière ou d’une autre, entre les pouvoirs publics, les constructeurs et les transporteurs. Vu les marges bénéficiaires limitées dans notre secteur, nous devons partir du principe que si la facture pour le transporteur augmente, ce coût devra être répercuté au client. »

La balle est dans le camp des pouvoirs publics

« Aussi bienvenue et nécessaire que soit la transition énergétique, nous devons rester attentifs à ce que notre position concurrentielle ne subisse pas une pression trop importante de la part de nos pays voisins. »

« Par exemple, aux Pays-Bas, les pouvoirs publics paieront bientôt 40 % du surcoût de la facture (en comparaison avec un camion au diesel) si un transporteur investit dans une flotte de camions zéro émission. Les pouvoirs publics néerlandais veulent en outre investir une partie importante de leurs revenus provenant des péages routiers pour rendre le transport routier plus écologique. Les autorités allemandes remboursent quant à elles pas moins de 80 % du surcoût supporté par les transporteurs à l’achat d’un camion zéro émission. Ces initiatives sont louables, mais en Belgique malheureusement aucune décision n’a encore été prise à ce sujet. Et ce n'est pas une bonne chose car, si nous n'agissons pas, les véhicules zéro émission viendront bientôt de l'étranger et les emplois des transporteurs belges seront en péril. »

« Pour également stimuler en Belgique le transport de fret à l’hydrogène, les pouvoirs publics pourraient par exemple sensiblement diminuer les tarifs de la taxe kilométrique pour ces véhicules. Nous ne cherchons pas à ne pas payer de taxe kilométrique pour les camions zéro émission car ces véhicules restent bien entendu des usagers de la route et les routes doivent être correctement entretenues. Mais, d’un autre côté, ils sont une bénédiction pour l’environnement et cela devrait être récompensé. »

« Ce que nous voulons éviter dans tous les cas c’est un système qui augmenterait encore la pression fiscale sur les camions au diesel. En d’autres termes, la stimulation de la transition énergétique ne peut pas se faire au détriment de la flotte de camions actuelle. »

Mesures pratiques à mettre en œuvre

« Il va de soi que nous avons besoin de davantage de stations de ravitaillement si nous voulons réaliser rapidement la transition vers l’hydrogène. Mais je suis convaincu qu’elles vont arriver sous peu. L’offre de camions à l’hydrogène est encore limitée en ce moment mais, sur ce point également, la situation évolue très vite. »

« À l’heure actuelle, plusieurs entreprises de transport belges ont déjà commencé à effectuer des tests avec des camions à l’hydrogène. L’intérêt du secteur est réel et de plus en plus concret. »

Contactez-nous si les solutions à l’hydrogène d’Air Liquide vous intéressent.

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